Emmanuelle Leneuf – oui, celle du #flashtweet ! – était il y a quelques semaines à Toulouse. Nous avons un peu discuté des différences entre le journalisme qu’elle pratique et ce que je peux faire, avec d’autres tweetos d’ailleurs.
C’était, je crois, la clé qui me manquait pour comprendre pourquoi la proposition du flashtweet était nouvelle.
Journalisme ou curation ?
Essayer de répondre à cette question c’est aussi mieux comprendre le « débat » qu’il y a eu avec Stéphane Briot lorsque le flashtweet fut lancé. Je dois avouer que je ne voyais pas la différence. Le résultat peut être identique – des liens dans des tweets – mais la démarche, l’intention, et la temporalité sont différentes.
La curation
Quand il a un lien, le curateur tweete. C’est moi, par exemple. Je tweete tout ce qui me tombe sous le doigt. Mes retweets ont parfois le souci de l’exhaustivité. Certes, j’essaye de ne pas tout tweeter en même temps, et j’utilise Buffer pour répartir les tweets dans la journée. Mais, si je ne tweete pas tout, je n’ai pas le souci du tri.
Le journalisme
Ne dîtes pas à Emmanuelle qu’elle fait de la curation. Elle vous répondra, comme à moi, qu’elle est journaliste. Elle sélectionne l’info pour son intérêt, la met en forme, et est indépendante vis à vis des sujets traités. C’est ce que l’on retrouve sur Wikipédia à propos du journalisme. Est-ce cela qui la différencie de Patrice Hillaire qui va parfois tweeter sur La Poste où il travaille ? Emmanuelle utilise, d’autre part, un compte différent de son personnel pour le flashtweet.
So What ?
Twitter et l’abondance d’information, me semble-t-il, a réduit la distance entre curateurs et journalistes.
- Il faut être un robot pour faire de la curation de manière exhaustive. Un humain est contraint par le temps. Il doit impérativement sélectionner, avoir une démarche éditoriale, consciemment ou non.
- Journalistes ou curateurs, nous avons tous accès aux mêmes outils, aux mêmes CMS. Les résultats se ressemblent donc. De plus, journalisme et marketing sont des activités de plus en plus poreuses. Nombreux sont les Community Manager avec une formation de journalisme par exemple, tandis que les CM, pour une raison ou une autre, produisent du contenu informatif.
S’il n’y a que l’intention qui est différente, comment alors la détecter ?
Des curateurs – tous les curateurs ne sont pas forcément militants pour une cause – font peut-être du journalisme, par exemple, mais sans en avoir conscience. Enfin, des robots comme Flint et ses copains arrivent aussi. Ils sélectionnent l’information, sont indépendants. Peut-on parler de robots journalistes (ou inversement) alors qu’ils n’ont pas conscience de l’être ? Ce sont des algos, ils n’ont pas conscience de quoi que ce soit pour le moment, d’ailleurs, et j’espère que Benoît Raphaël, le papa, ne m’en voudra pas de le dire 😉
Il n’y a pas de conclusion à cet article. Je voulais garder une trace de l’échange avec Emmanuelle. Merci au passage à Anouk Déqué d’avoir permis cette rencontre.
Je suis profondément convaincu que la démocratie est fille du journalisme, et non l’inverse (sur le sujet, lire le très documenté Du journalisme en démocratie de Géraldine Mulhmann).
J’avais écrit (mais je ne sais plus où !) il y a quelques années que l’utilisation des médias sociaux est avant tout un enjeu démocratique, bien avant d’être un enjeu marketing ou de branding. C’est toujours vrai.
Se poser la question de l’accès à l’information, de sa diffusion, de son traitement est toujours actuel alors que les fake news se répandent. Ce billet est ma contribution au débat.
J'avais dit à @EmmanuelleL9 que j'allais bloguer sur les différences entre la #curation et le #journalisme, c'est fait ! Au passage, je mentionne de @4h18 @hillairepatrice et @benoitraphael et vivent les débats 😉
Et merci @AnoukDEQUE !
— Philippe Couzon Ⓥ (@pcouzon) 30 décembre 2017