Mercredi, pour le premier jour du Web, une discussion a eu lieu, sur scène, entre différents intervenants pour essayer de comprendre les différences entrepreneuriales entre les États-Unis d’Amérique et le continent européen.
L’Union fait la force.
J’ai retenu, d’abord et avant tout, la différence administrative du Viel et du Nouveau Monde.
Les EUA sont une fédération. Des règles similaires s’appliquent du Pacifique à l’Atlantique. Pour lever des fonds, c’est fantastique.
En Europe, au contraire, les règles sont fragmentées. Londres a beau être à 1 heure et demie de Paris, les situations pour les entreprises sont complètement différentes.
Leadership.
L’Europe manque aussi de leaders pour tirer le marché, par une vision globale des choses. Loïc Lemeur faisait remarquer que la plateforme de vidéos Dailymotion était née avant Youtube. Mais elle a limité ses ambitions à l’Hexagone.
Une seule zone pour innover ?
Lorsque Loïc parlait des États-Unis, il s’est repris. Les USA, pour lui, c’était surtout la Silicon Valley, San Francisco. Or, sur scène, un entrepreneur lui apparaissait un peu comme une anomalie, tout en reconnaissant son succès, le fondateur de Foursquare, Dennis Crowley. Il est d’une ville dont on attend pas grand chose en terme de technologie apparemment. C’est une vieille ville : New York.
Ma conviction (au delà du fait que le taux de population à Manhattan rend Foursquare très ludique), c’est qu’il n’y a pas de raison pour qu’on puisse pas faire quelque chose dans des villes aussi perdues que New York, Paris ou Vienne.
Je ne comprends pas – peut-être suis-je trop naïf, ou que je manque d’expérience -, qu’on puisse penser qu’il n’y ait qu’un lieu où l’on puisse faire des choses qui vont changer le monde. Parce que je ne suis pas encore allé à SF ?
Partager en pitchant.
Au cours des différentes discussions que j’ai pu avoir, on m’a dit qu’une des différences entre la Silicone Valley et l’Europe était la culture du partage.
Si j’ai bien compris, à San Francisco, les entreprises se pitchent régulièrement devant les autres. Un peu comme les open coffees, mais avec toutes les entreprises qui innovent.
En France, ça ne prend pas.
Moins de partages, de rencontres, donc d’innovations.
Paris.
Pour moi, la situation parisienne, notamment, est surréaliste. Des personnes m’ont dit qu’elles attendaient Le Web pour rencontrer d’autres parisiens, parce que les distances étaient trop grandes d’un arrondissement à l’autre ! Si Lilian Mahoukou avait été là, avec son concept d’élasticité géographique, je suis sûr qu’il aurait bondi !
Si vous n’avez pas de voiture, amis parisiens, sachez qu’il existe depuis plus d’un siècle le métro, qu’il est possible de parcourir plusieurs kilomètres à pied sans être fatigué (une des premières fois où je suis venu à Paris, j’ai commencé par aller voir la mairie de Neuilly, à pied, depuis la gare de Lyon….). Et, sinon, il existe un service assez innovant, le taxi ;-) Je dis cela en toute amitié ;)
Paris devrait prendre exemple sur la Bretagne : quand la Cantine de Rennes s’est ouverte, il y avait 1000 personnes, venant de toute la Bretagne, et même bien au delà.
Lyon.
J’ai été en fac à Lyon et connais un peu la ville, mais il y a deux ou trois choses que je n’arrive pas à expliquer :
- Il y a deux ans, lorsque j’ai parlé de BarCamp, on m’a dit que les lyonnais préféraient aller sur Paris, qu’ils ne croyaient pas qu’on puisse faire quelque chose à Lyon.
- Il y a quelques semaines, après l’inauguration de la Cantine rennaise, lorsque j’ai parlé d’un espace de coworking, on m’a dit que Lyon était trop petite. Que Lyon ait moins d’habitants que Paris, je l’admets. Par contre, qu’on trouve moins de travailleurs du web qu’à Saint-Etienne (avec le Comptoir numérique), Toulouse (avec la Mélée), Dijon (en cours), je ne le crois pas une seconde.
Depuis un peu plus d’an, notamment sous l’impulsion de Kriisiis, Savatte, Manoz, des apéros Facebook / Twitter sont régulièrement organisés. Il y a maintenant une centaine de personnes qui tournent autour de ce mouvement. C’est énorme.
Jonathan Guillemain (Novaway) est aussi un acteur majeur grâce notamment à l’organisation de l’évènement de la Ferme du Web. La 3ème édition est en cours de préparation et Djo cherche des partenaires (et, je dis ça je ne dis rien, mais plus de 100 geeks qui se réunissent, qui sont à la pointe, génération Y, hyperconnectés, ce serait une erreur de ne pas être partenaires, hein ? ;))
A part cela ? Les Open Coffees rassemblent, pour le moment, une poignée de personnes (traduction pour tout startupeur : allez y, vous y serez remarquables !), les meetfridays…. Créés en 2010 (sauf erreur), il me semble que cela marque un changement important.
Lyon est en train de bouger et je suis persuadé que cela ne peut que s’amplifier : le mouvement appelle le mouvement et le partage permet aux innovations de se répandre.
Trois solutions.
Je ne crois pas que le soleil et les trolleys de San Francisco expliquent une seconde le succès de la Silicon Valley.
Il me semble que, si cela fonctionne, c’est parce que les entreprises qui s’y trouvent ont envie de partager et d’innover. Il y a alors trois solutions par rapport à cela :
- S’installer à San Francisco.
- Renoncer.
- Commencer à changer les choses là où on est. Les cycles d’innovations seront sans doute plus long qu’à SF mais ils toucheront alors bien plus de monde.
Gandhi disait : « Sois le changement que tu veux voir en ce monde. » J’ai envie d’ajouter : et travaille comme si tu étais dans la Silicon Valley ;-)
Edit : 12 décembre, 10h : ajout de contacts pour les apéros Twitter, rendons à César ce qui lui revient ;-)
La cas de SF et de la Silicon Valley va au delà du simple aspect entrepreneuriale. Toutes personnes ayant été à SF pourra te confirmer qu’il se passe quelque chose de très spéciale dans cette ville. Quelque chose dans l’air d’indéfinissable qui te donne envie d’avance, de partager, d’avoir l’esprit ouvert et de créer. Pas étonnant qu’un grand nb de mouvements soient partis d’ici.
Quand a Lyon, je te rejoins totalement. Ce n’est pas les personnes, ni les projets ou les envies qui manquent. C’est certes une ville de réseaux, mais ils sont très cloisonnés. On croise toujours les mêmes personnes avec le même profil au twapéro, idem lors des apéros blogueurs ou du coté des entrepreneur. Il n’y a aucun brassage qui pourrait booster les idées et les projets. Heureusement mon petit doigt me dit qu’il devrait y avoir du changement début 2011.
San Francisco : il faudra peut-être que j’aille y faire un tour (ou plus) alors :-)
Pour Lyon : le petit doigt devrait parler plus fort pour être entendu ;-)
Bonjour Philippe,
Mon petit doigt me dit que le texte reflète une discussion que nous avons eu lors du dernier MeetFriday, initiative de notre ami commun Lilian.
Habitant entre Dijon et Lyon, j’ai la possibilité de comparer. Si Lyon n’avance pas et ne fait pas, la Bourgogne va le faire, lol.
Le petit doigt ne voudrait rien annoncer qui ne soit pas officiel, mais il n’hesitera pas a parler fort quand les 2 projets en cours seront sortis des cartons…
@qyrool pas de brassage aux aperos alors qu’on ne t’y a presque jamais vu?.. oui.
@Vincent : Oui ;-) Je suis d’ailleurs pas étonné qu’à Dijon la mayonnaise prenne bien :-)
@Qyrool : Feel free to speak out the box ;-)
@Savatte : C’est vrai, alors, vous allez brasser une bière spéciale Twitter ? ;-)
Merci Philippe pour ce billet fort intéressant sur lequel je souhaite apporter quelques contributions.
je crois que le principal frein à notre développement, c’est nous, c-a-d notre socio-culture, nos postures mentales bien françaises et bien ancrées depuis … toujours.
Quand vous dites « l’union fait la force » c’est vrai, mais ici, en France, on n’y croit pas. On préfère penser que nous sommes chacun plus intelligent que les autres et que nous arriverons tout seul mieux que les autres. On est hanté par le mythe de la « super idée qui fait toute la différence » entretenue par M6 / Capital et la presse spécialisée qui nous réécrit chaque semaine l’histoire de réussites de « petits malins ». C’est un leurre ! Le succès et la réussite, sont avant tout la rencontre entre une longue préparation et une opportunité. Dans ce contexte, il reste très difficile de pratiquer la « collaboration générative » qui fait le succès des américains depuis des décennies.
Ainsi, on comprendra que les « leaders » auront du mal à émerger en France, car on ne les aiment pas. j’appelle leader celui qui a une vision et de l’énergie et qui s’engage dans quelque chose qui n’a pas encore fait ses preuves. Vis a vis du leader, on sera d’abord cynique. Puis, s’il commence a avoir quelques petits résultats on deviendra critique. Si les résultats se confirment, la jalousie prendra le relais. Puis l’envie. Une fois devenu un « vrai » leader avec des succès indiscutables, alors on le courtisera avant de basculer dans l’admiration conditionnée par un développement sans faille, sinon attention au retour de la critique.
Et cela se traduit à tous les niveaux, aussi bien au niveau des médias, du milieu du capital risque, des communautés professionnelles, etc.
Ceci étant dit, il est vrai qu’un business disposant d’un marché domestique de quelques dizaines de millions de personnes réfractaires à l’innovation et au succès de l’autre ne peut pas avoir les mêmes perspectives de développement qu’un marché américain disposant de plusieurs centaines de millions de consommateurs « homogènes » plus ouvert à l’innovation et élevés dans la culture du succès et de la réussite.
Bref, on pourrait en parler pendant des heures tant l’enjeu. Pour s’en sortir, c’est notre éducation qu’il faudra revoir en profondeur, ca prendra du temps, mais « aux hommes de bonnes volonté, rien d’impossible ! »
Merci pour ce commentaire Jean-David, apprécié :-)
Il me semble que les choses changent, que nos « postures » évoluent, notamment parce que l’Internet est mondial.
Il me semble que ce n’est pas seulement la « culture du succès et de la réussite » qui fait la différence, mais aussi l’acceptation de l’échec comme initiatique et, donc, transitoire.
J’ai ete faire 2 tours à San Francisco. Avant, je n.avais vraiment pas compris pourquoi Loic Lemeur etait parti dans la silicon valley. Une fois sur place, on comprend beaucoup mieux.
Au dela de la culture de l’échange, la proximité extreme permet d’avoir des contacts avec des gens intouchables en France. A SF, il y formement quelqun qui connait …
Cette proximité n’est pas en France. On arrive de temps eb temps à Paris à avoir cet effet, mais c’est rare.
Il y a aussi une quantité d’évenements TIC impressionnant, plusiers par semaines. Autant d’occasion de rencontrer du monde.
Très bon article, on voit que le Web ouvre l’esprit ;)
Par contre, je ne pense pas qu’il n’y ait que dans la Silicon Valley que l’on ait envie d’innover la preuve FaceBook vient d’Harvard (Boston) , Amazon (Seattle) et encore plein d’autres.
Je vois plus la Silicon Valley commme un WebDeux ou LeWeb permanent sur toute l’année cela permet d’échanger pour les jeunes créateurs, de trouver des investisseurs, des partenaires, … il est vrai aussi que le fait que cela soit des nouvelles technologies accélèrent le changement.
;)
@Olivier et @Florent: Je commence à saisir… Ce serait donc la proximité / concentration et les évènements qui facilitent les échanges la clé ? Ne reste plus qu’à rendre le terreau européen un peu plus favorable alors :-)
@Lilian : content que cela t’ait plu ;-)